Exclusif : Joseph Lacroix répond à nos questions sur WoW Chroniques

Lyrka | 10/06/2016 à 10h46 - 3

World of Warcraft : Chroniques est disponible depuis mercredi en version française. Nous n'avons pu résister à l'envie de contacter Joseph Lacroix, illustrateur qui a participé à la réalisation de cet ouvrage. Toujours disponible et ouvert, il nous a fait le grand plaisir de répondre à nos questions. Et cerise sur le gâteau, il nous a donné la possibilité de vous présenter plusieurs de ses croquis.


Bonjour Joseph, comment vas-tu depuis le Comic Diablo et cette jolie aventure qui t'a permis de travailler avec Blizzard ?

Ben, ça va très bien merci. Depuis, j'ai arrêté mon activité de professeur de dessin et je me consacre à plein temps à la BD et à l'illustration.


À l'époque de The Sword of Justice, tu m'avais expliqué avoir beaucoup joué à World of Warcraft. Qu'est que ça fait de replonger en Azeroth, d'autant plus que c'est pour en illustrer l'histoire ?

C'est vrai que c'est un peu une consécration pour moi. Après avoir passé plusieurs années sur le jeu, de manière assidue, pouvoir revenir dessus en temps qu'illustrateur, c'est vraiment incroyable. Je ne m'en serai jamais douté à l'époque. Pour avoir parcouru Azeroth de long en large, à pied, à dos de loup ou dans les airs, je connaissais bien la géographie. Je suis assez nostalgique de ses années à jouer à Wow. Le PVE, à 40 devant son ordinateurs, ça avait quelque chose d'extraordinaire, je ne sais pas s'il y existe un équivalent depuis.


Quand Blizzard t'a contacté au sujet de WoW: Chronicle ? Peux-tu nous en dire plus sur le processus de création d'une illustration et le temps que tu as mis pour les réaliser ?

Blizzard m'a contacté avec des demandes bien précises. J'avais collaboré avec Matt Burns sur Le livre de Tyraël et je pense que Matt ainsi que Doug A. Gregory (qui travaille aujourd'hui à la réalisation de films animés pour Blizzard) m'ont choisi pour ce travail.

Sur ce livre, j'avais vraiment trois types d'illustrations très différentes à réaliser : des ornementations, des cartes et le tableau de la cosmologie (Cosmology Chart, je ne sais pas comment ils vont l'appeler en Français). Le travail s'est échelonné sur 2 à 3 mois l'année dernière à la même période. Blizzard m'a fourni beaucoup de documentation visuelle mais comme la période n'était que peu traitée dans le jeu, il a fallu faire beaucoup d'allers et retours entre nous pour qu'on se mette d'accord. Le livre traitant en grande partie des Titans, ils m'ont conseillé de m'inspirer principalement de l'architecture dorique, puis ionique et corinthienne en fur à mesure de l'écoulement du temps.



Personnellement, j'ai été passionné par les cartes. Découvrir le continent de Kalimdor originel, l'évolution des régions et puis l'éclatement suite à l'implosion du Puits d'éternité est vraiment génial. J'imagine que Blizzard avait une idée très précise du résultat final. Quel a été ta latitude à ce sujet ?

Oui, je n'étais pas très rassuré à l'idée de faire ces cartes. Évidemment, Blizzard a une idée très précise sur l'évolution des continents : à quel moment quelle île est appaue etc. Mais il y avait aussi beaucoup d'incertitudes sur des pans entiers de la géographie. Pour le continent originel de Kalimdor, ils m'ont fourni un schéma avec la forme générale du continent et les éléments importants à y faire figurer. Pour représenter ce continent avant la grande fracture (the Great Sundering), j'ai essayé de recoller les morceaux à partir des cartes actuelles et j'ai fait des propositions pour le reste . Mais je pense qu'il y avait de sacrés débats chez Blizzard parce qu'il y a eu beaucoup de changements et je devais attendre de longues semaines avant que les cartes ne soient validées.


À quel stade du développement es-tu intervenu ? Étais-tu au courant des textes de Chris Metzen et son équipe ou devais-tu te diriger un peu à l'aveugle ?

Je pense que l'essentiel des textes étaient écrits. Je ne connaissais pas leur contenu. J'avais connaissance des différents chapitres à traiter puisqu'il fallait adapter le graphisme des ornementations en fonction de ceux-ci mais c'est tout. C'est un peu un travail à l'aveugle, il faut être source de proposition et progresser un peu à tâtons. Matt Burns m'a fourni beaucoup de conseils.




L'éloignement géographique ne pose-t-il pas trop de souci quand on doit réaliser un travail tel que celui-ci pour Blizzard ? Comment se déroulaient les debriefs ?

Non, aucun problème. Tout se fait par mail en fait. Par contre, il faut être très réactif et répondre rapidement. L'équipe de Blizzard est très pro, ils savent ce qu'ils veulent et en même temps ils sont toujours ravis de voir arriver de nouveaux dessins et ils le font savoir. Travailler avec eux est vraiment agréable, ils sont enthousiastes.

Par exemple, pendant que j'étais en train de me casser le nez sur les cartes, pour me divertir, j'ai dessiné un petit bateau, un Zeppelin et une hydre pour apporter un peu d'animation au fond de la carte. Ce n'était pas vraiment prévu mais ça m'a voulu pas mal de mails enthousiastes des différents protagonistes de l'ouvrage qui aimaient bien l'esprit de ces dessins. Finalement, ça m'a aussi aidé à comprendre ce qu'ils avaient envie de voir.

L'univers de Wow est moins sombre que celui de Diablo, moins réaliste. La structure du dessin doit être composée de formes plus stylisées et géométriques.


Contrairement à The Sword of Justice, tu n'étais pas seul aux commandes. Comment s'est déroulée la collaboration avec Peter Lee ?

Non, malheureusement, je n'ai pas été en relation avec Peter Lee seulement avec l'équipe éditoriale.



Un anecdote un peu amusante pendant le développement ?

Il y a une semaine Matt Burns m'a envoyé la photo du dos d'une jeune femme qui était en train de se faire tatouer la "Charte Cosmique"... Je dois dire que ça m'a bien surpris et un peu flatté aussi. Mais ça en dit surtout long sur la passion des fans du jeu et sur l'exigence qu'ils ont envers le développement de son univers. Quand ils aiment, ils aiment vraiment !


Tu as annoncé, via ton blog, que le volume 2 de Chronicle était en préparation. J'imagine que tu ne peux pas dévoiler grand chose à son sujet, mais peut-être peux-tu nous parler des éléments sur lesquels tu travailles ?

Arf, malheureusement je vais vous décevoir. J'ai été contacté pour savoir si j'étais disponible pour travailler dessus mais je n'en sais pas plus. Ma part de travail n'a pas encore commencé.


D'un point de vue technique, quels sont les outils que tu as utilisé ?

Pour travailler sur les ornementations et les illustrations, j'ai travaillé avec des stylos V-Ball. Qui me permettent d'avoir un trait agressif et un peu lâché. Pour les cartes après avoir tâtonné, j'ai finalement tout encré à la plume et à l'encre sépia. Bien sur il y a un gros travail numérique derrière, notamment sur les teintes et les couleurs mais je souhaitais qu'il y ait de la nuance de valeur dans le trait, qu'il ne soit pas trop uniforme, trop parfait. J'ai fait trois cartes à différentes périodes à une assez grande échelle car je savais que certaines parties des cartes seraient imprimées en pleine pages. Dessiner et encrer toutes ces petites montagnes, c'était bien bien long, haha.



Quels conseils pourrais-tu donner aux dessinateurs qui aimeraient, un jour, avoir la chance de bosser avec Blizzard ? On voit beaucoup de fan arts exceptionnels, comment se démarquer ?

C'est vrai que l'on me pose souvent la question et c'est difficile d'y répondre. Je sais que j'ai été contacté par Doug A. Grégory pour faire le comics "Diablo 3, Sword of Justice" parce qu'il est lui même grand amateur de comics et de BD franco-belges et je pense qu'il sentait dans mon travail cette double influence. Du reste, j'ai été très impressionné par la culture artistique des directeurs artistiques avec qui j'ai pu travailler chez Blizzard. Ils ont vraiment une connaissance incroyable des illustrateurs actifs et de l'histoire de l'illustration et de l'art en général. Pour le Livre de Tyraël, ils voulaient des illustrateurs travaillant "à l'ancienne" : dessin, papier, encre. Bref, pas que du tout numérique. Et pour ce livre, ils ont fait travailler des illustrateurs venant de tous horizons et nationalités.

Donc pour répondre à la question, je dirais qu'il faut cultiver sa personnalité et son originalité tout en restant accessible.

Sinon, ce qui est sûr, c'est qu'il faut parfaitement parler et écrire l'anglais. Être toujours très réactif aux mails. Et sérieux évidemment, sur la qualité du travail bien sûr mais aussi sur les délais à tenir. Il ne faut pas avoir peur de montrer son enthousiasme aussi et le partager, c'est la culture nord américaine et c'est vraiment agréable.


Peux-tu nous en dire un peu plus sur tes projets à venir ? Ton année 2016 semble chargée si on en croit ton blog.

Oui, je travaille sur 3 comics/BD de 22 pages sur la vie de Gaston Fébus avec la scénariste Lucie Braud et L'atelier In-8. Et je suis aussi en relation avec Johann Blais qui développe un projet de jeu vidéo très intéressant qui s'appelle Hora. Un jeu d'exploration dans un univers sauvage et fascinant.


Quelque chose à ajouter, un dernier message à faire passer peut-être ?

Mmm... longue vie à WOW et JudgeHype !




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