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Wylvan, naissance d'un chaman

Par Reevenn

Wylvan, naissance d'un chaman

Cette terre ocre et brûlante, Wylvan la foulait depuis sa naissance. Son enfance, passée au village de Sen'jin, n'avait pas été des plus heureuse. Chaque jour nouveau était pour lui une épreuve ou un calvaire. Si le climat aride de la région et la perte de ses parents durant sa neuvième année, étaient déjà difficile à supporter, il lui fallait endurer jour après jour les moqueries incessantes de ses propres congénères.

Wylvan était pour son plus grand malheur, né avec une anomalie. Pourtant, bébé, il n'y paraissait rien. Un mignon petit troll disait-on de lui. Mais avec le temps, sa différence devint de plus en plus évidente. A la différence de tout troll, lui n'avait pas de défense. Les siennes n'avaient jamais poussé. Même les femmes de sa race avaient les dents plus longues que lui. Pour son peuple, les défenses sont le signe d'une grande force et ceux ayant les plus longues se sont souvent vu hériter le rang de chef de tribu. Lui qui n'en avait pas, était considéré comme un moins que rien, une honte à leur noble race.

A force d'être sans cesse rejeté, il avait perdu toute joie de vivre. Il aurait voulu partir, mais il n'en avait pas le courage. Il se disait que de toute façon, partout où il irait on se moquerait de lui. S'il devait vivre dans la souffrance, autant que cela soit dans la vieille hutte que ses parents lui avaient légué. C'était d'ailleurs son seul refuge. Il y restait caché aussi longtemps que sa résistance à la faim le lui permettait.

Mais ce jour-là, l'estomac tenaillé par les crampes, il se résigna à sortir pour chercher un peu de nourriture. Il aurait aimé avoir un peu de viande au menu, mais il ne savait pas chasser. Personne ne lui avait appris. D'ailleurs, tout ce qu'il savait faire, il l'avait appris par lui-même où en copiant les autres. Par chance, il savait quels fruits et racines étaient comestibles. Il connaissait comme sa poche les alentours du village et savait où trouver pitance à n'importe quelle saison. C'était bien maigre à chaque fois, mais cela lui suffisait. De toute façon, il ne voulait pas passer trop de temps parmi les trolls normaux. Il s'arrangeait pour sortir ou tôt le matin ou tard le soir. Il évitait cependant la nuit car les bêtes sauvages rodant autour du village étaient nombreuses. Il était faible et n'avait jamais appris à se défendre. Que cela soit physiquement ou verbalement d'ailleurs.

Les villageois le savaient et ne se gênaient pas pour en profiter. De toute façon, même s'il avait tenté de se faire justice, il ne pouvait pas s'opposer au village tout entier. Parfois, on l'avait battu et pourtant jamais il n'avait levé la main à son tour. Mais la pire des souffrances était de loin la souffrance morale.

Ce jour-là, alors qu'il traversait le village pour retourner dans sa prison de hutte, quelques-un de ses semblables commencèrent, comme chaque fois, à l'insulter. Il hâta sa marche, baissant la tête et courbant le dos autant que possible. Mais cela n'eut pour seul effet que de recevoir de nouvelles moqueries. Il faisait semblant de ne pas entendre. A force, il ne les écoutait plus. Savoir ce qu'étaient ses mots lancés contre lui, lui suffisait bien assez. Mais cette phrase, jamais il ne l'avait entendue auparavant. Jamais aucun de ses congénères n'avaient osé franchir une telle limite. Sans comprendre pourquoi, on venait de le traiter d'elfe de la nuit. Pour tout troll, il n'existe pas de pire insulte. Etre comparé au pire ennemi de son peuple lui fit l'effet d'une flèche reçue en plein coeur. Il s'arrêta de marcher, paralysé par la douleur qui serrait sa poitrine. Ses bras retombèrent, laissant choir dans la poussière sa maigre récolte. Ses yeux devinrent humides et des larmes commencèrent à ruisseler sur ses joues. Et pendant qu'il était là, pleurant toute sa peine, les rires et les moqueries ne cessaient de pleuvoir. Pour eux, c'était un amusement. Comment ? Se dit-il. Comment avaient-ils pu aller si loin ? Lui qui faisait tout pour rester le plus discret possible, chaque fois on le prenait en ridicule. Aujourd'hui, la limite était franchie. Sa tristesse devint dégoût. Jamais il n'aurait pensé un jour ressentir cela pour son peuple. Même s'il ne les aimait pas pour ce qu'ils lui avaient fait endurer, ils étaient quand même sa seule famille.

Mais aujourd'hui, il n'en voulait plus. Leur présence à ses côtés était devenue un trop fort poison. Alors, il se mit à courir. Il voulait partir loin d'eux. Ne plus les entendre. Tant pis si la nuit allait bientôt tomber, il ne retournerait pas au village. Plus jamais ! Il se moquait bien de la mort maintenant. Après tout, elle serait plus douce que sa misérable vie.

Ce ne fut que lorsque la douleur de ses pieds, écorchés par les pierres coupantes, devint insupportable pour son corps trop faible, qu'il s'arrêta. Il ne savait pas combien de temps il avait couru comme ça. Il se retourna et constata qu'il ne voyait pas le village. Jamais il ne s'était aventuré si loin. Sa colère et sa peine firent soudain place à la peur. Il réalisa qu'en fait il n'était pas encore prêt à quitter ce monde. Il voulait maintenant retourner dans sa hutte après tout ce qui venait de se passer. Il ne comprenait pas pourquoi il arrivait si facilement à pardonner. Peut-être parce qu'après tout c'était ça, sa vie. Sa différence l'y avait condamné.

La nuit tomba. Plus vite qu'il ne l'aurait cru. Il ne voyait toujours pas les feux de la ville. Pourtant le ciel était clair et la lune brillante lui permettait de voir où il mettait les pieds. Mais il dut bien se résoudre à comprendre qu'il s'était perdu. Dans ce pays, les gens égarés ne vivaient pas longtemps. Il le savait et sa peur allait en grandissant. Marcher droit devant lui, sans savoir où il arriverait, était devenu le seul moyen pour lui de ne pas penser à ce qui pourrait lui arriver. S'arrêter était de toute façon bien trop dangereux. Il lui fallait trouver un abri. Seulement, dans ce pays, chaque trou pouvait abriter une bête féroce. Chaque pierre cacher un danger mortel.

Envahi par la peur d'une fin atroce, il préférait ne pas s'arrêter. S'il devait continuer à marcher toute la nuit alors il le ferait. Seulement, comme il le redoutait, son corps finit par s'écrouler de fatigue. Ce corps qu'il détestait l'abandonnait lui aussi maintenant. Malgré sa volonté, il ne put résister longtemps au sommeil. Allongé quelque part au milieu du désert, il crut alors que son heure était venu. Si une bête tombait sur lui, il serait dévoré sans pouvoir lutter.

Pourtant, lorsque la chaleur grimpante le tira de ses cauchemars, il réalisa avec bonheur qu'il était encore en vie. Pour la première fois, il ressentait du plaisir à voir un nouveau jour se lever. Mais très vite il se rappela qu'il pourrait bien être le dernier. Alors, avec moins de peine qu'il ne l'aurait cru, il se releva.

C'est alors qu'il comprit que la faiblesse de son corps la nuit passée lui avait en fait sauvé la vie. Derrière un buisson, droit devant lui, à quelques pas, un profond canyon aurait été son tombeau s'il avait continué d'avancer. Il s'approcha du bord et comprit qu'il devait changer de direction. Mais par où devait-il aller maintenant ? Longer le bord du précipice ne le conduirait nulle part de toute évidence. Il décida de faire demi-tour. Peut-être finirait-il par tomber sur son village.

Il marcha, longtemps, droit devant, sans s'arrêter, avec l'espoir de gagner un endroit sûr avant la fin de la journée. Mais si la nuit est dangereuse, le jour lui aussi a ses dangers. A commencer par le soleil brulant.

Wylvan, au moment le plus chaud de la journée, commença à ressentir les effets de la soif. Sa tête se mit à tourner et sa vue se brouilla peu à peu. S'il ne trouvait pas vite de l'eau, il ne verrait pas le jour suivant se lever. Rassemblant ses dernières forces, titubant et soufflant, il continua d'avancer. Toujours droit devant. L'eau rare restait introuvable et sa volonté de vivre diminuait à chaque pas de plus qu'il réussissait à faire.

Tant pis, il n'en pouvait plus. Il abandonnait tout espoir et se laissait tomber face contre terre. Il n'avait plus la force de continuer. Il sentait déjà les oiseaux, annonciateur de la mort, planer au-dessus de lui.

Un bruit attira alors son attention. Il ouvrit les yeux et vit non loin de lui un grand serpent. Sifflant et ondulant entre les pierres, il venait vers lui. Sa taille gigantesque se révéla vraiment lorsque celui-ci se dressa. La bête semblait à la fois intriguée et fâchée de trouver ce troll sur son chemin. Wylvan, lui, pensa terrifié que le reptile allait l'engloutir et qu'il finirait digéré dans son ventre.

Il ne pouvait plus bouger, son corps le refusait. Quand le grand serpent s'enroula autour de lui, il pleura sa misérable vie. Aujourd'hui son destin prenait fin. Ne supportant pas l'idée de se sentir avalé, il s'évanouit.

Il ne savait pas combien de temps son esprit mettrait pour rejoindre la terre de ses ancêtres. L'idée de revoir ses parents le réjouit alors. Il allait enfin connaître la paix. Lorsque la lumière apparut à nouveau dans ses yeux, il s'attendait naturellement à voir un autre pays. Mais tout ce qu'il vit, c'était cette terre ocre. Il n'était donc pas mort ? Non puisqu'il sentait les rayons brulants du soleil sur sa peau.

Soudain, le souvenir terrifiant du grand serpent le tira de sa léthargie ! Il se redressa, s'appuyant sur les coudes de ses deux longs bras, et chercha du regard le reptile qu'il avait pensé être son bourreau. Mais pas la moindre trace du monstre. Il était parti. Ses yeux balayèrent le paysage désertique face à lui et il fut alors surpris de voir qu'il n'était plus là où il était tombé. Plus incroyable encore, devant lui se trouvait une petite mare. Wylvan rampa jusqu'au bord de l'eau et plongea entièrement la tête dans le liquide incroyablement clair et pur. Après avoir bu à s'en noyer, il releva la tête et observa un moment son visage déformé par les remous. Ce pouvait-il que ce serpent l'ait conduit jusqu'ici ? L'avait-il sauvé alors qu'il aurait pu faire de lui son repas ? Wylvan contempla son visage sur le miroir de l'eau lisse et vit qu'il souriait. Il était encore en vie et cela suffisait à son bonheur. Son infirmité ne le dérangeait plus. Lui qui avant ne supportait pas de voir son reflet n'y prêtait même plus attention.

Ses forces retrouvées, de même que sa volonté de vivre, il se releva et se remit en marche. Toujours tout droit vers l'inconnu. Il savait que le serpent ne lui avait donné qu'une nouvelle chance de survivre au désert. Si il ne retrouvait pas la civilisation rapidement, il finirait tôt ou tard par succomber. Et à présent, c'était la faim qui se faisait sentir tandis que le jour déclinait peu à peu. Il n'avait rien avalé depuis si longtemps maintenant. Il était prêt à manger n'importe quoi. Mais les racines et les baies qu'il connaissait ne poussaient pas là où ses pas l'avaient conduit.

Les yeux scrutant le sol dans l'espoir de trouver le moindre petit insecte à croquer, il entendit un bruit qui étrangement ne lui était pas inconnu. Ne réussissant pas à retrouver dans sa mémoire son origine, il laissa ce son guider ses pas jusqu'à sa source. Ecartant de ses bras maigres un buisson épineux, il vit apparaître là, sous ses yeux, le serpent qui l'avait sauvé. Sifflant de toutes ses forces, son corps se tortillait dans tous les sens pour tenter de se dégager d'un rocher tombé sur lui. Quand ? Comment ? Wylvan ne le savait pas. Mais le lapin mort à quelques mètres du grand reptile lui fit penser que cela était arrivé alors qu'il chassait. Sa taille imposante avait pu facilement faire chavirer le rocher. Coincé, le serpent n'avait pas eu le temps d'avaler sa proie mortellement blessé par son poison.

Wylvan s'approcha. Le serpent sentit les vibrations de ses pas et cessa de lutter. Il le fixa de ses grands yeux noirs en amande. Il était maintenant si calme. Peut-être était-il à bout de force, pensa le troll. Il n'avait qu'à prendre un gros caillou et lui fendre le crâne et il aurait son repas. Un festin même ! Et si il revenait au village avec un tel trophée, peut être que plus aucun de ses semblables n'oserait se moquer de lui à nouveau...

Il ramassa alors une lourde pierre ayant un bout pointue et s'approcha lentement. Si le serpent comprenait son intention il risquait de le mordre et finirait comme le lapin. Quand il fut assez proche, il leva en l'air son arme archaïque et fixa du regard sa cible.

Les yeux du reptile transpercèrent alors son coeur. Non, il ne pouvait pas ! Hurlant sa rage envers lui d'avoir osé penser tuer l'être l'ayant sauvé, il lança la pierre aussi loin que ses muscles le purent. Les yeux plein de larmes de regret, il réussit péniblement à faire rouler le rocher et libéra le serpent de son emprise. Puis, à bout de force, il tomba à genoux et fit une chose qu'il n'aurait jamais cru faire un jour. Il s'adressa à l'animal et lui implora son pardon.

Bien sûr, il ne s'attendait pas à l'entendre lui répondre. Le serpent, sans un seul sifflement, rampa jusqu'au lapin qu'il avait tué. Il le saisit dans sa gueule et revint auprès de Wylvan pour le déposer devant lui. Puis, sans bruit, il disparut derrière les buissons et les rochers.

Le troll n'en revenait pas. Par deux fois, ce serpent lui avait sauvé la vie. Ce soir-là, il pleura sa gratitude envers cette bête incroyable, tout en remplissant son estomac du lapin qu'il ne méritait pas à ses yeux.

Lorsque le jour se leva à nouveau, Wylvan avait plus que jamais la soif de vivre. Si un serpent avait pu être aussi bon avec lui, alors peut-être qu'il rencontrerait un jour des trolls qui l'accepteraient. Il croyait cela possible à présent et cette idée l'encourageait à avancer. L'idée folle d'avoir un jour des amis le traversa même.

Soudain, au loin, il crut reconnaître un piton rocheux. Oui, pas de doute, le village de Sen'jin était au sud de ce dernier. Il accéléra le pas, marchant droit vers la masse rouge qui s'élevait au-dessus de la plaine désertique.

Après quelques heures, il arriva enfin à ses pieds et décida d'en faire le tour par l'ouest jusqu'à rejoindre l'autre côté. De là le village ne serait plus loin. Son coeur s'emplit de joie. Il avait déjà oublié ce que ses congénères lui avaient fait endurer. Il était heureux de pouvoir les revoir et ne voulait pas croire qu'il n'en soit pas de même pour eux.

Il lui fallut tout le restant de la journée pour atteindre enfin le foyer qu'il avait cru perdu à jamais. Lorsqu'il entra dans ce dernier il cria pour annoncer son retour à tout le monde. Le choc fut rude lorsqu'il comprit que personne n'avait remarqué son absence. Il resta là, au milieu de la place, les bras pendant. Dans sa tête l'incompréhension régnait. Pourquoi ? Pourquoi avait-il cru que son retour les réjouirait, eux qui ne l'avaient jamais aimé.

« Vas t'en ! » Lui cria quelqu'un.

Le reste de la foule ne tarda pas à en faire de même.

Pourquoi ? Pourquoi le rejetait-on encore ? Même le chef du village prenait parti dans ce nouveau témoignage de dégoût envers sa personne. Lui qui avait rêvé d'un accueil chaleureux. Juste une fois. Aujourd'hui seulement lui aurait suffi.

Au lieu de ça, comme il ne partait pas, quelques un commencèrent à s'approcher de lui. Lui criant de retourner chez lui et même de quitter le village pour de bon cette fois. L'un d'eux fini par le jeter au sol. Et son corps reçu alors coup de pieds et coups de poings. Pourquoi ? Pourquoi sa différence justifiait une telle cruauté ?

Soudain, des cris d'effroi retentirent dans l'assistance. Il sentit ceux qui le frappaient s'écarter de lui. Il ouvrit les yeux et vit alors la tête du grand serpent dressé au-dessus de lui, tenant dans sa gueule un troll remuant pour se libérer. Les cris ne s'arrêtaient pas.

« Arrête... » Murmura Wylvan. « Arrête, je t'en supplie... Ils ne méritent pas la mort... »

A son grand étonnement, le reptile laissa lourdement tomber sa victime. Mais il ne bougea pas et défia de son regard perçant la foule de trolls affolés.
Mais bientôt, certains revinrent avec des armes, bien décidés à terrasser le monstre qui venait de blesser l'un des leurs.

Wylvan avait compris qu'il n'avait fait que le protéger. Mais pourquoi ? Pourquoi l'avait-il suivi jusqu'ici ?

Il vit alors toutes sortes de projectiles passer au-dessus de lui et s'abattre sur le serpent venu pour lui. Il ne bougeait pas et encaissait les blessures. Attendait-il que lui soit à l'abri pour partir ? Mais Wylvan comprit en essayant de bouger que tous ses membres avaient été brisés par les coups reçus. Il ne pouvait pas se déplacer.

« Va t'en ! Sauve-toi ! » Lui cria t-il.

« Il est avec lui ! C'est lui qui l'a emmené ici ! » entendit-il alors.

Non, c'était faux ! Il était venu de lui-même. Il ne voulait pas tout cela. Ce serpent, il ne savait pas pourquoi, ne cessait de venir à son secours. Il ne lui avait pourtant rien demandé.

« Va t'en ! » Implora-t-il de nouveau au serpent.

Mais ce dernier ne bougea que pour recevoir une hache que Wylvan aurait reçu s'il ne l'avait pas fait.

« Tuez-les ! » hurlait la foule.

« Je suis désolé ! » pleura Wylvan. « Je ne peux pas bouger... Je suis désolé... »

Le serpent ne partirait pas sans lui. Il l'avait compris.

Il entendit alors un hurlement de rage. Relevant la tête, il vit le chef du village fondre sur le serpent, sa lance pointée vers l'avant. Il allait percer le coeur du serpent si celui-ci ne bougeait pas. Il le protégerait jusqu'à sa mort. Etait-ce parce que lui aussi lui avait sauvé la vie ? Il pensait pourtant simplement avoir honoré une dette.

Dans les yeux du reptile, Wylvan vit alors des larmes. Avait-il comprit que la lance allait le tuer ?

Soudain, le troll sentit une rage profonde monter en lui ! Non, il ne laisserait pas ce serpent mourir ! Il était son ami et ne le permettrait pas !

Oubliant la douleur de ses os brisés, il se releva et s'opposa au chef du village. Mais ce dernier, en pleine course et emporté par l'esprit meurtrier du berserker, ne s'arrêta pas et transperça le corps de Wylvan et le coeur du grand serpent d'une seule et puissante estocade.

« Pou...pourquoi...? » gémit Wylvan, les dents rougies par le sang emplissant sa bouche.

Lâchant son arme, le chef vit le monstre qu'il visait s'effondrer, entrainant le troll sans défenses avec lui.

Finalement, c'est en regagnant ce qu'il croyait être son seul abri sûr qu'il avait trouvé la mort. Son esprit planait au-dessus de son corps sans vie et il pouvait voir les villageois se réjouir de leur victoire. Ils acclamaient leur chef, tandis que lui montait lentement vers les cieux. Sa mort ne les chagrinait même pas.

« Ne soit pas triste » lui dit alors une voie dans son dos.

Sans savoir comment, il se retourna et contempla l'esprit imposant de son ami serpent. Il ne s'étonna pas de l'entendre lui parler. Après tous les esprits parlent, c'est bien connu.

« Tu vas vivre, Troll. Tu vas vivre et accomplir ce pour quoi, de par mon sacrifice, tu es maintenant destiné. Tu es l'élu. Tu es mon élu. Celui qui va recevoir la force de mon esprit et le don de comprendre les esprits. Tu vas embrasser la voie de tous ceux qui par le passé ont reçu le même présent. Tu seras chaman ! Vis et continue de suivre ce chemin qui a croisé le mien. Honore ce sacrifice que je fais pour toi en vivant pleinement chaque nouveau jour. Apprend et enseigne ce qui te sera transmis à ceux qui, comme toi, recevront ce don. En ce jour, je mêle mon esprit au tien et t'offre une nouvelle vie ! »

Sans qu'il n'ait le temps de dire un mot, l'esprit reptilien fondit sur lui et pénétra son âme. Il vit toute sa longueur disparaître dans son propre esprit. Puis, tout devint néant.

En bas, dans le monde des vivants, les clameurs cessèrent. Un spectacle incroyable les avait soudainement laissés sans voie. Dans une éblouissante lumière verte, le corps du grand serpent venait de se changer en feuilles luisantes d'un mystérieux éclat. Puis, tel son ancien aspect, ondulant dans les airs, elles enveloppèrent le corps sans vie de Wylvan.
Après avoir tourbillonnées quelques instants, elles s'évaporèrent en une éclatante lueur verte qui illumina tout le village.

Sans comprendre comment, Wylvan se réveilla debout face à ses semblables toujours sans voix. Si eux ne comprenait pas ce qui venait de se passer, Wylvan, lui, si. Son ami venait de lui offrir une nouvelle vie. Il sentit toutefois des changements en lui. Il percevait une nouvelle force étrange qui le fascinait et le terrifiait à la fois. Il pencha la tête pour s'assurer que sa blessure avait disparue et réalisa alors que ce n'était pas la seule chose qui avait changé chez lui. Des défenses ! De longues et robustes défenses ornaient maintenant fièrement son visage !

Wylvan sourit. Ce jour était à la fois le plus triste et le plus beau de sa vie.

« Regardez ! » s'écria alors quelqu'un. Wylvan crut un instant que le doigt pointait vers lui. Mais il réalisa vite que les regards fixaient quelque chose dans son dos. Avec l'espoir de voir son ami serpent, il se retourna. Il fut un instant déçu de ne voir qu'un tauren. Mais il se rappela que le serpent n'était pas vraiment mort. Il vivait à travers lui à présent.

Une légère rafale de vent chaud fit onduler la toison brune du tauren. Se tenant à l'entrée du village, il ne prêta même pas attention aux trolls qui le dévisageaient. Son regard bovin fixait Wylvan. Il émanait de lui une étrange aura qui rassurait le troll, sans qu'il ne sache pourquoi.

« Je suis venu pour toi, troll » dit alors le tauren d'une voie calme et apaisante. « Les esprits m'ont prévenu de la naissance de l'un des nôtres. »

« Es-tu... »

« Un chaman ? Oui, je le suis. Tout comme toi tu es maintenant destiné à le devenir. »

« Le serpent... Il m'a dit la même chose. »

« C'est donc bien toi qu'il a choisi comme élu. J'en suis heureux pour toi. »

« Vous le connaissiez ? »

« Son esprit, oui, en effet. Une nuit, durant mes méditations, il m'a raconté son histoire. Pour son plus grand malheur, il était différent des autres serpents de son espèce qui, de tout temps, étaient venus au monde les écailles vertes. Le destin avait voulu que les siennes soient totalement rouges. Ses semblables, le rejetèrent pour cette simple différence. Le coeur rempli de chagrin, il finit un jour par penser que quitter son pays d'origine était son seul espoir de trouver la paix. Il vint alors dans ce pays de terre ocre en pensant y trouver refuge. Ce fut le cas. Mais il n'y trouva également que la solitude et bien qu'il fût en paix, la joie lui était toujours inconnue. Jusqu'à une rencontre... ta rencontre... Te sauver lui apporta la joie qu'il cherchait.»

« C'est donc pour cela qu'il m'a sauvé de la soif plutôt que de faire de moi son repas. Nous partagions la même souffrance et si je ne le savais pas, lui l'avait compris. »

« Et il ne s'était pas trompé en te secourant, car je sais par l'esprit du vent qui parcourt ces terres, qu'à ton tour tu lui es venu en aide. Cet acte t'honore troll. Tu lui a fait connaître bien plus que la joie, tu lui a offert ton amitié. Son sacrifice pour toi, il ne l'a pas fait sans raison. »

« Peut-être... Mais il n'est pas vraiment mort, n'est-ce pas ?

« C'est vrai. Tu peux déjà sentir en toi la force de son esprit. Moi-même je la perçois. Viens avec moi, troll. Viens avec moi et je t'enseignerais la voie du chaman. Tu deviendras fort et sera respecté pour ton savoir. Tu seras redouté par tes ennemis et suivi comme un guide par ceux livrant bataille à tes côtés. Je ne te promets rien d'autre, mais pas moins, les esprits m'en sont témoins. »

« Tous ce que je demande, c'est vivre ce destin qu'il m'a offert. C'était sa volonté. »

« Et tu le vivras, frère... tu le vivras... viens... ici tu n'as plus qu'un passé révolu... marchons ensemble vers ton avenir promis. »
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